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Madame, Monsieur,
Chers amis,
Je me sens particulièrement touché par les événements dont nous sommes témoins en Tunisie depuis quelques jours. Pas seulement parce que ma femme
est franco-tunisienne et que ma belle-famille vit ces heures d'espoir mêlées d'angoisse, après 23 ans de dictature et de pillage de ce beau pays.
Depuis que j'ai dix-huit je vis avec le sentiment d'être un citoyen du monde. Avec pour conséquence que je me sens concerné par tout ce qui touche mes frères et mes sœurs humains, quel que soit l'endroit de la planète. Je ne sais plus quel philosophe disait: «Je suis un humain. Par conséquent, je me sens concerné par tout ce qui touche à l'humain». [Note de ADVS: L'écrivain latin Plaute a dit: "Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m'est étranger".] Je repense aussi à cette phrase du Christ (je rappelle que je n'appartiens plus à aucune religion, mais je n'ai pas jeté le bébé avec l'eau du bain): «Ce que vous ferez au plus petit d'entre les Miens, c'est à Moi que vous le ferez».
Je ne suis pas un analyste politique et je laisse cet exercice à ceux qui ont quelque chose de pertinent à dire. Ce que je veux vous partager, c'est
ce que représente, pour moi, ce mouvement qui est en marche. Je me suis demandé: qu'est-ce qui a permis cette révolution? Plusieurs éléments, d'après moi.
Tout d'abord, le peuple tunisien est un des peuples d'Afrique du Nord parmi les plus instruits et les plus
éduqués. Remarquons que le mouvement de protestation est venu massivement des jeunes adultes dont le niveau d'instruction est élevé;
Ensuite, les Tunisiens ont vécu avec la claire conscience qu'ils vivaient dans une dictature. C'était tangible, c'était palpable.
Le pillage de la nation par la famille présidentielle, la corruption omniprésente, y compris de la police, tout cela ne laissait aucun doute pour ceux qui vivaient là-bas;
Depuis longtemps, les réseaux sociaux (comme Facebook, Twitter, etc.) et les moyens de communication (le taux de pénétration de la téléphonie est
proche de 100 % en Tunisie) ont permis aux Tunisiens de tisser des réseaux de solidarité et d'information. Ce qui leur a permis de se transmettre des informations non manipulées
de ce qui se passait réellement dans les rues. Ce qui leur a permis également de se mobiliser extrêmement rapidement lorsque le temps est venu, malgré le risque d'être tués, pour
exiger le départ de Ben Ali;
Également, il a fallu un élément déclencheur: l'immolation de ce jeune diplômé qui s'était vu confisquer par la police ce qu'il
vendait dans la rue pour survivre, tout simplement. Cet acte de désespoir a trouvé une résonance chez les centaines de milliers de personnes qui ressentaient
depuis longtemps un ras-le-bol face à cette dictature corrompue;
Enfin (et c'est à souligner), le général Rachid Amar a refusé de mobiliser l'armée contre son propre peuple, ce qui lui a coûté
cher personnellement, puisqu'il fut limogé...
Pour résumer, le renversement du dictateur a été permis parce que des individus étaient instruits,
conscients (qu'ils vivaient dans une dictature), reliés (par les réseaux sociaux) et solidaires et parce que certains auxiliaires du pouvoir ont
choisi de faire passer leur sécurité personnelle derrière les valeurs élevées du respect des droits humains fondamentaux.
En écho à cela, rappelons-nous que l'histoire nous a montré que tous les coups d'États ont suivi à peu près le même
scénario:
- fermeture immédiate des universités (pour empêcher ceux qui pensent par eux-mêmes de réagir et de se mobiliser);
- prise de contrôle des médias pour manipuler l'information, et donc manipuler la masse du peuple (tout va très bien, dormez en
paix bonnes gens, la situation est sous contrôle, votre bon père veille sur la nation);
- interdiction des réunions publiques (pour éviter la mise en place des réseaux de résistance, de solidarité et de
mobilisation);
- censure de tous les médias d'information indépendants.
Pourquoi je vous parle de tout cela? aujourd'hui? C'est parce qu'en méditant sur les événements de ces derniers jours, je ne peux m'empêcher de
faire des parallèles avec la situation que nous, les occidentaux des pays dits démocratiques, vivons en ce moment. Car si nous osons regarder au-delà des
apparences, nous devrions peut-être nous poser la question: vivons-nous dans une dictature? Dictature politique, dictature
financière, dictature médicale, dictature scientifique, dictature judiciaire.
Le problème, c'est que la grande majorité d'entre nous ne se pose pas cette question pourtant fondamentale: une dictature ne se serait-elle pas installée dans nos contrées, avec notre complicité involontaire et inconsciente? Que nous vivions en Europe ou au Canada, la dictature ne cache-t-elle pas son vrai visage derrière des apparences de démocratie?
Posons-nous ces questions:
Vivons-nous dans une dictature politique? On peut se poser la question,
quand on voit que les pays européens ont abandonné leur souveraineté pour se soumettre à l'Union Européenne, qui est dirigée par un conseil
et un président désignés par l'élite mondiale, et non élus démocratiquement... Et quand on voit que le Canada, les
États-Unis et le Mexique s'apprêtent à vivre la même chose, à l'insu de la population et des élus politiques, il y a de quoi frémir...
Vivons-nous dans une dictature financière? Que dire, quand on voit que
les pays ont abandonné leur pouvoir de battre leur propre monnaie, pour l'emprunter à des banques centrales privées qui chargent
des intérêts qui, à eux seuls, alourdissent toujours plus le déficit et la faillite des nations? Et comment penser autrement lorsqu'on voit que la faillite que
les banques ont créée en menant des opérations spéculatives illégales a été, finalement, épongée par nos propres impôts, provoquant une
paupérisation de plus en plus grande des populations et un enrichissement écœurant de ces mêmes banques privées?
Vivons-nous dans une dictature médicale? Comment qualifier cela autrement,
lorsque l'on découvre que les gouvernements sont soumis aux exigences des compagnies pharmaceutiques en matière de santé publique et de
vaccination, préférant favoriser la santé financière de ces dernières plutôt que la santé physique de leurs populations (les révélations
sur le contrat de GSK dans le dossier H1N1 en est une illustration éloquente)? Et que penser du fait que les "experts" qui formulent les
recommandations en matière de santé publique sont, très majoritairement, financés par les compagnies pharmaceutiques elle-mêmes?
Vivons dans une dictature scientifique? On est en droit de s'interroger, en
tout cas, lorsqu'on voit que des scientifiques honnêtes, motivés par le bien-être de l'Humanité, voient leur carrière brisée et leurs
découvertes étouffées parce que leurs travaux menacent les intérêts économiques de certains groupes ou pire, pourraient redonner aux individus la maîtrise de leur propre vie en matière
d'alimentation, de santé ou d'énergie...
Vivons-nous dans une dictature judiciaire? Plus que jamais il est nécessaire
de se poser la question, lorsque l'on voit que manifester contre un abus est assimilé à un acte terroriste ou criminel et qu'à
présent, le simple fait d'être soupçonné d'être dangereux pour la sécurité nationale peut nous mettre en situation de garde à vue sans limitation de durée… L'existence de
Guantanamo n'étant que la partie émergée de l'iceberg...
Bien sûr, nous n'en sommes pas au point de vivre ce que le peuple tunisien (ou d'autres) a vécu ces dernières décennies. Quoique. Quand je reprends
le scénario de l'installation d'une dictature (fermeture des universités, contrôle des médias, interdiction des réseaux de solidarité et censure des canaux d'information alternatifs), j'éprouve
un étrange malaise.
Je me sens mal à l'aise lorsque je vois que la qualité de l'enseignement s'est dégradée de manière continue depuis trente ans, lorsque je vois que
l'on supprime les cours d'histoire et de philosophie des programmes. Avec pour conséquence, que la majorité des jeunes est de moins en moins capable de penser par elle-même, de
façon critique et intelligente, sans perspective et sans repères issus du passé? Bien sûr, c'est moins brutal que la fermeture des universités. Mais n'est-ce pas, en fin de compte, plus efficace?
Un peuple stupide, inculte et ignorant peut-il vraiment désirer se rebeller contre la dictature en place?
Je me sens mal à l'aise lorsque je constate que les médias dominants (presse écrite, radio et audiovisuelle) sont devenus des instruments de
propagande au service des intérêts de cette élite minoritaire qui pille et saccage la planète entière. Et je m'interroge lorsque, jamais, une position discordante n'a voix au
chapitre des journaux et des magazines, à propos des grands enjeux de ce vingt-et-unième siècle. Sauf s'il s'agit de lyncher, de ridiculiser, de diffamer cette position: alors là, tout à
coup, les penseurs dissidents font la une de l'actualité (sans pour autant pouvoir s'exprimer eux-mêmes).
Je me sens mal à l'aise quand je lis, dans l'évaluation de la gestion de la crise H1N1 (évaluations de l'OMS mais aussi de différents gouvernements)
qu'une des choses à améliorer pour la prochaine pandémie, c'est la censure et le contrôle des réseaux sociaux et d'Internet, pour empêcher les opposants de discréditer le bien-fondé du principe
vaccinal (!!!).
Je vous invite, sincèrement, à vous poser ces questions. Et à tenter d'y répondre avec votre propre discernement.
Je ne prétends pas détenir la moindre vérité à propos de ce qui se passe. Mais j'estime que c'est notre devoir à tous de nous informer, de nous former et de
tirer nos propres conclusions. Et d'adopter, à tout le moins, une attitude critique à l'égard des milieux politiques, financiers, médicaux, scientifiques, judiciaires et
médiatiques.
Pour revenir aux Tunisiens, j'ignore si le départ de leur dictateur changera les choses fondamentalement. Je le répète - je ne suis pas analyste
politique et mon propos n'est pas de fournir une analyse précise de la situation. Mais ce que je ressens aujourd'hui, c'est un immense espoir pour nous tous. Parce que des
individus ont appris à penser par eux-mêmes, parce qu'ils ont pris conscience de la situation dictatoriale dans laquelle ils se trouvaient, parce qu'ils ont
tissé des réseaux d'entraide, de solidarité et de communication, ils ont pu se remettre debout, fièrement, sans violence. Et faire tomber un dictateur qui semblait indéboulonnable il y a encore un mois.
Ce que les Tunisiens ont fait cette semaine, nous pouvons, nous aussi, le faire.
C'est la raison pour laquelle je dédie ma vie depuis près de trente ans à informer et à former mes semblables, en leur apprenant à penser par
eux-mêmes, à se soigner par eux-mêmes, à gérer leurs relations par eux-mêmes.
Comme je le répète souvent: «S'informer et se former est un acte de liberté et d'autonomie!» L'exploit des Tunisiens m'encourage à diffuser encore davantage l'essence de mon travail, à travers de nouveaux livres et de nouveaux DVD en préparation, à travers le programme des nouvelles conférences et des nouveaux séminaires.
Ne désespérons pas. On pourrait croire que la dictature mondiale est à la veille de révéler son véritable visage. Mais contre l'instruction, la
connaissance de la vérité, la conscience des manipulations et l'acceptation des risques, ils ne pourront rien faire, si ce n'est demander asile aux extra-terrestres (puisqu'il n'y aura plus de place pour eux sur cette Terre). Nous pouvons créer une meilleure vie, nous pouvons créer un meilleur
monde.
Souvenez-vous de cette phrase de Gandhi, que je répétais l'an dernier, pendant la crise de la grippe H1N1: «Un
individu conscient, éveillé et debout est plus dangereux pour le pouvoir en place que 10.000 individus endormis et apeurés».
Le peuple tunisien nous a donné un exemple à suivre. Il nous a prouvé que reprendre notre vie en mains n'était pas une utopie: c'est à notre portée. À condition de le décider.
Plus que jamais, restons unis, conscients et debout.
Jean-Jacques Crèvecoeur
Montréal (Québec)
www.jean-jacques-crevecoeur.com
A voir et à entendre: Pour approfondir l'interpellant message de Jean-Jacques Crèvecœur il est possible, en particulier en Europe francophone, de découvrir ses vidéos de conférences en allant sur cette page.
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